Pas-de-foot


Le pas-de-deux, je connais : 10 ans de danse classique il y a des siècles de ça - on vous avez déjà dit que la danse ça conserve, non ? - je vous l'aurais peut-être esquissé avec un semblant de grâce.

Loin de la légèreté classique, nous voici donc dans l'ère du pas-de-foot : pas une soirée sans que le petit écran nous renvoie un terrain vert clinquant à faire pâlir d'envie la plus sage des normandes. Au lieu de brouter paisiblement l'espace ainsi mis à leur disposition, les hommes font quoi ? Ils courent après la baballe. Histoire d'oublier les jupons pendant 90 minutes de leur journée. Toujours ça de pris.

Etant donné cette inflation footballistique incontournable, j'ai le plus naturellement du monde décidé de me retirer aux fourneaux. Comme ça, les clichés ne tomberont pas ce soir, c'est sûr. Je vous écris donc dans la plus grande mode de la femme au foyer (celle de moins de 50 ans, tout de même) moderne : l'ordinateur portable sous le coude, le couteau aiguisé (pour tous usages) dans la main gauche et la panzanella en double page sur mon livre de cuisine.

Panzanella ? Ce n'est pas un pas de deux. Mais ça peut se manger à deux, préférablement pas en rythme afin d'éviter la camisole de force si jeunes ; ce serait du gâchis prématuré... Ça peut se manger à deux, oui, mais si tenté que soit gentil mari de baisser les yeux pour enfourcher la bouchée et pas mon pied gentiment replié sur le canapé pour un confort féminin absolu (plus personne ne s'assoit de nos jours, les bonnes manières se perdent).

Venons-en au fait culinaire du soir :

- 1 kg de tomates assez fermes
- 2 gousses d'ail
- 1 oignon blanc finement coupé + un paquet de Kleenex avec au moins 2 mouchoirs dedans
- 150 g de pain de campagne rassis et légèrement doré au grill
- 5 cuillères à soupe d'huile d'olive
- 3 cuillères à soupe de vinaigre de vin
- sel, poivre


Vous vous doutez bien que pour un plateau télé conjugué à la sauce au testostérone je n'allais pas vous préparer un soufflé.

Là, le pain grille gentiment au four - je vous conseille de commencer par cette étape si, comme moi, vous n'avez pas de pain rassis sous la main.

Pendant ce temps, on coupe l'oignon et on sort le premier Kleenex (ah, le coup d'envoi retentit - c'est du direct que je vous livre, pur et rond comme le célèbre ballon) et les tomates. Hachez l'ail finement et mettez le tout dans un saladier on ne peut plus résistant - les coups d'éclat pendant les matchs, ça casse tout à la ronde. N'oubliez pas le basilic.

Passionnée comme je suis par l'huile d'olive (ah, la camisole de force se rapproche à grands pas), il va de soi que je vais vous conseiller de ne pas arroser ce plat simplissime avec n'importe quoi (définition : le jus d'imposture vendu dans les grandes surfaces, fade et inodore comme les crèmes antifongiques) ; choisissez une huile au goût frais, sentant bon le citron et l'herbe coupée ; il faut qu'elle soit bien équilibrée, pas trop poivrée et pas trop forte pour ne pas effacer le caractère des autres ingrédients (surtout que les tomates de nos latitudes, c'est un concentré en eau et c'est tout...). Allez, le coup de sifflet final : vinaigre, sel (Maldon si vous en avez et vive la reine d'Angleterre !) et un petit tour de moulin à poivre comme les grands chefs, puis deux petits tours de terrain pour la gloire gastronomique.

Il ne reste plus qu'à savourer allègrement en évitant de s'étouffer à chaque fois que l'équipe tricolore (la France today) effleure le ballon de ses rêves. Dur de passer une soirée où il n'y a pas de foot par les temps qui courent, dur...

J'oubliais : le deuxième Kleenex, c'est pour la fin du match, en cas de défaite de votre équipe fétiche, quelle qu'elle soit. Courage.

Photos : TheDaydreamer (via iPhone)

2 commentaires:

  1. Je vais tenter de me mettre aux fourneaux après avoir lu ta recette si alléchante ! Avec un peu de chance, je mettrai le feu à la télé ;) A Londres, les rues sont désertes, les pubs remplis à craquer, les caisses des supermarchés presque toutes fermées un samedi soir (du jamais vu) et les appartements aux fenêtres ouvertes chantent, rient et crient au rythme du ballon... Bisous et bon courage. M.

    ReplyDelete
  2. TheDaydreamerdiaryJune 14, 2010 at 10:11 PM

    Dans ces cas-là, les fourneaux sont un havre de paix, promis :-)

    ReplyDelete

Let me hear about your daydreams!

 

What's in the archive?